TAFOS (FR)
Des hommes préparent des cordes pour obtenir une épaisseur uniforme afin de construire le pont Q’eswachaka.
© Nieves Callasi, atelier Yanaoca / TAFOS
Talleres de Fotografía Social (TAFOS) était un projet pionnier de photographie communautaire qui s’est déroulé entre 1986 et 1998. Ses années d’activité les plus intenses ont coïncidé avec le conflit interne au Pérou. Travaillant en collaboration avec des syndicats, des groupes de jeunes, des coopératives agricoles et de nombreuses autres organisations communautaires, TAFOS a organisé des ateliers pour plus de 270 photographes communautaires issus de 30 communautés à travers tout le pays. Ces photographes ont utilisé la photographie comme un outil pour soutenir la résistance non violente et l’organisation communautaire en plein conflit.
Durant les années de conflit péruvien, le groupe guérillero maoïste Sendero Luminoso et son rival, le mouvement marxiste-léniniste Movimiento Revolucionario Túpac Amaru (MRTA), ont mené une insurrection révolutionnaire violente contre l’État péruvien. En même temps, le pays souffrait d’un effondrement économique grave qui a plongé de nombreuses personnes dans la pauvreté. Les deux camps utilisaient des tactiques terroristes brutales, et la majeure partie des combats se déroulait dans les régions andines, touchant de manière disproportionnée les communautés indigènes rurales. Ces communautés ont subi de graves abus, assassinats et disparitions. Face à cette violence croissante, de nombreux civils se sont organisés pour se protéger, créant des réseaux de soutien pour contrer les violences, l’insécurité et les privations économiques. C’est dans ce contexte que TAFOS a vu le jour

Des hommes et des femmes jouant.
© Sebastian Turpo, atelier Ayaviri / TAFOS
Le premier atelier TAFOS a été organisé à la suite d’une demande d’un leader local, Gregorio Condori, qui avait demandé à un photographe allemand et à son épouse, Thomas et Helga Müller, travaillant dans sa communauté à Ocongate près de Cusco, de lui prêter un appareil photo pour documenter des preuves contre un juge exigeant un pot-de-vin. Par la suite, Condori et Müller ont proposé au comité des droits de l’homme d’Ocongate d’organiser des ateliers pour former plus de membres en tant que photographes communautaires. Cela a conduit à de nombreux autres ateliers à mesure que d’autres groupes communautaires se rapprochaient de TAFOS avec le désir d’apprendre la photographie : des collectifs paysans dans les régions andines comme Ayacucho, des syndicats de mineurs à Junín, des groupes de jeunes et de femmes, des étudiants, des organisations communautaires dans les bidonvilles des grandes villes péruviennes et des communautés afro-péruviennes sur la côte.
Les photographes TAFOS étaient des membres actifs d’organisations de base désireux d’apprendre à utiliser la photographie comme un outil de communication. Ils ont documenté les conditions de travail, l’agitation politique, la mobilisation de base et la vie communautaire quotidienne pendant une période turbulente de l’histoire péruvienne. Ils ont utilisé la photographie pour renforcer la résilience et la résistance communautaires face à la violence et au conflit. TAFOS a fourni une formation photographique de base, des équipements, des pellicules, ainsi que des services de développement et d’impression aux groupes communautaires qui menaient et coordonnaient leurs activités photographiques. Les ateliers ont commencé à diminuer à partir de 1993, alors que le paysage politique changeait et réduisait la demande. Aujourd’hui, une archive de plus de 150 000 images TAFOS est conservée à l’université catholique pontificale du Pérou à Lima, où elle continue d’être utilisée par des chercheurs et des étudiants.
Un mienur proteste aves des photos.
© Felix Asto, atelier Morococho / TAFOS

© Photographe inconnu / TAFOS
‘Une des manières de créer un nouvel ordre social dans un pays fragmenté est que les gens reconstruisent leur image, leur visage, leurs mots… C’est de ce drame et de ce besoin de récupérer leur propre image qu’est né le projet TAFOS… Cette photographie de contexte n’est pas une fin, mais un moyen : un moyen d’identification locale, sectorielle et nationale, un moyen de dénonciation d’une part, et une arme de confrontation idéologique et de récupération du droit à l’identité et à la différence d’autre part’.

Bia (ma chienne labrador) au bord de la mer, Playa Pulpos.
© Luis Garcia, atelier des Musiciens / TAFOS

Regardant un journal TAFOS
© Nicacio Chiara, atelier Yanaoca / TAFOS
